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NOUVELLES

Solidaires, malgré tout!

Donia Zeineddine

La guerre est venue frapper, à nouveau, à la porte des Libanais, au Liban, mais aussi au Québec. Nous ne sommes pas comme nos compatriotes, sous les bombardements, mais je n’exagère pas si je vous dis que c’est comme si on l’était.

Je ne veux pas étaler un point de vue politique ou exposer une analyse historique du problème, ni proposer des solutions. Je veux raconter mon vécu douloureux, et je suis sûre qu’il ressemble à celui de plusieurs personnes de la communauté libanaise au Québec.

L’inquiétude est à son comble, les bombardements intenses, des milliers d’évacués, des civils tués, blessés, terrorisés par les frappes incessantes, des familles endeuillées, des enfants et des jeunes privés d’école. Un peuple privé d’une vie, comme si le destin s’acharnait impitoyablement sur le Liban, qui a vécu et survécu à toute sorte de crises, de guerres et de terreur. Je suis paralysée et impuissante pour arrêter ce massacre. Nous vivons ici, nous avons eu la possibilité de choisir et d’adopter un nouveau pays et de construire une nouvelle vie au Québec.

On essaie de faire semblant de tenir une routine, et de nous dire que tout va bien aller. Il ne s’agit pas d’une indifférence ou d’un déni de la réalité. La vérité nous rattrape, le stress intense nous accable, une impuissance ressentie, impuissance amère sur comment aider, encourager, soutenir les nôtres à l’autre bout de la planète.

Un effort immense est déployé pour nous réveiller tous les matins, après des nuits tourmentées par les nouvelles de nos proches, les nouvelles de notre Liban. Dotés d’une force considérable pour pouvoir prendre un appel d’une soeur qui tremblotait, en panique, en allant chercher son enfant de l’école, d’une amie qui pleurait parce qu’elle ne sait pas où aller se cacher.

Responsabilités

En parallèle, nous menons une vie en faisant face à de multiples responsabilités, dont celles envers notre pays natal, envers nos familles et nos amis. Une détermination à garder un sourire au visage alors que le coeur baigne dans la tristesse.

Prendre les nouvelles de nos parents et amis au Liban et aussi partager leur peur, sentir leur angoisse, voir leur regard paniqué, leur tristesse, leur perte. Un courage plus que nécessaire pour rassurer nos proches, les écouter et les comprendre. Notre pays se dissèque sous les regards « prudents », silencieux, du monde.

La douleur silencieuse étouffe mon coeur. Mes cicatrices de guerre ne sont pas guéries et ne le seront probablement jamais. Elles sont prêtes à s’ouvrir à chaque instant.

Mes douleurs ne se gênent même pas de m’assourdir avec leur bavardage interminable. Beaucoup d’émotions se manifestent à chaque information reçue, à chaque appel. Se relever, trouver un moyen pour arrêter l’injustice que subit le peuple libanais, d’aider les innocents attaqués, de ramener les enfants à l’école et de dire à haute voix, de crier « ça suffit ».

Chacun de nous mène tous les jours une bataille pour ne pas tomber, pour rassembler tout le courage possible pour avancer, pour trouver un espoir, une lueur pour ne pas sombrer dans la noirceur. À des milliers de kilomètres de notre Liban, nous ne pouvons que ressentir une amertume, un dégoût face aux scènes d’horreur qui se déroulent dans ce petit pays.

Des discours comme « dénoncer », « refuser » et « condamner », dénués de toute action sérieuse, ne peuvent pas arrêter ces crimes. Et je passe sur les messages hypocrites, racistes même, qu’envoient, sans retenue, certains analystes politiques ou journalistes.

Quitter le pays a été un choix déchirant pour moi et mon mari. Nous avons quitté le Liban, mais le Liban refuse de nous quitter, il nous habite, et ce, en permanence.

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