“Profession Bonniche”, le nouveau roman engagé de Gisèle Kayata Eid
Dans son nouveau roman, Profession bonniche, la journaliste et auteure libano-canadienne Gisèle Kayata Eid dénonce les conditions de vie et de travail des employés domestiques étrangers au Liban. Un récit audacieux qui incite à remettre en question des mentalités et des pratiques sociales.
Auteure de plusieurs essais et récits, Gisèle Kayata Eid signe son deuxième roman, Profession bonniche, paru aux éditions Complicités. Pour la journaliste et auteure libano-canadienne, un septième livre, ça se fête! Car le chiffre 7 symbolise la sagesse spirituelle, invitant à la réflexion et à la méditation. Justement, Gisèle nous porte à réfléchir sur la situation déplorable des employés domestiques au Liban, à travers ce récit inspiré de faits réels.
Une initiative courageuse qui met le doigt sur la plaie, une histoire qui parle à tous les Libanais.
Le récit évoque les déboires de Jessie, une employée de maison philippine, qui se voit privée de ses papiers au bout de trois ans d’”esclavage” dans un foyer libanais. “Elle n’aura ses papiers que si elle retourne dans son pays”, tel est le verdict de la maîtresse de maison, car sa “bonniche” refuse de renouveler son contrat chez la même famille.
Le parcours de Jessie est celui de milliers d’autres dont Gisèle a voulu porter la cause. L’auteure s’engage ainsi à faire entendre haut et fort la voix de ces “bonnes à tout faire” réduites au silence, impuissantes face à la réglementation injuste du système de la kafala (garantie). L’employeur, qui est le “garant”, signe le contrat de travail avec le bureau de placement. De ce fait, l’employée de maison ne possède aucun droit et il n’existe aucune loi pour la protéger.
Exposée à tous les revers, subissant toutes sortes d’abus, la protagoniste évolue parmi les loups, mais rencontre heureusement quelques anges gardiens qui la soutiennent jusqu’au bout. Ainsi, la romancière explore plusieurs types humains, parmi ces Libanais que nous côtoyons au quotidien. Elle le dit dans son avant-propos, “tous les employeurs ne sont pas des malfrats, fort heureusement”. Par ailleurs, elle précise que “même des personnes de bonne foi” sont piégées, sans s’en rendre compte, dans un système de pensée relevant de l’esclavagisme.
Le lecteur est non seulement introduit dans les coulisses du monde des travailleurs étrangers au Liban, il est surtout conduit à voir l’humain derrière ces domestiques. Un autre tour de force de Gisèle, qui prend soin de révéler le cheminement de Jessie sur la voie de la féminité. Un message humaniste, témoignant de l’universalité de la nature humaine.
La vie ne tient qu’à un fil pour ces femmes et ces hommes vivant parfois dans une sorte de clandestinité forcée. “L’avenir pour [eux] n’a jamais été dessiné avec un pinceau”. Comme un navire en pleine tempête, ils avancent à la merci des vents, sans aucun contrôle sur leur destin.
Mis à part l’empathie que l’écriture déclenche chez le lecteur, le texte a surtout pour but de faire bouger les consciences, puis l’état des lieux.
Pour ce faire, Gisèle Kayata Eid vous invite à échanger des idées dans une série de rencontres littéraires, le 26 mars ainsi que le 3 et le 5 avril. Elle sera accompagnée de Me Mohana Ishak, responsable des affaires légales dans l’ONG Kafa, qui œuvre dans le domaine de la protection contre la violence.