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«On est dans le mur»: 14 230 enseignants manqueront à l’appel d’ici quatre ans

La pénurie d’enseignants est déjà criante dans le réseau scolaire, mais elle ne fera que s’aggraver au cours des prochaines années. Québec prévoit qu’il manquera 14 230 profs dans les écoles québécoises d’ici quatre ans, ce qui fait craindre le pire à des acteurs du réseau scolaire et des experts.

La situation est à ce point critique que des solutions drastiques sont mises de l’avant pour contrer la pénurie, comme la réduction du parcours scolaire d’une année.

«ON N’Y ARRIVERA PAS»

Le ministère de l’Éducation prévoit, dans un document daté de juin obtenu par Le Journal, que le nombre «d’enseignants manquants» dans le réseau scolaire public s’élèvera à 3600 en moyenne pour chacune des quatre prochaines années, pour un total de 14 230 (voir détails plus bas).

Ce nombre comprend 6000 postes ou contrats, majoritairement au secondaire, alors que les autres besoins sont pour des remplacements et de la suppléance.

«C’est encore pire que ce à quoi on s’attendait. On le voit, mathématiquement, on n’y arrivera pas», laisse tomber Nicolas Prévost, président de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement.

«On ne s’en va pas dans le mur, on est dans le mur», lance de son côté Martin Maltais, professeur de financement et de politiques éducatives à l’Université du Québec à Rimouski.

«Avec des chiffres comme ceux-là, le ministre va devoir envisager autre chose» que les solutions mises de l’avant jusqu’à maintenant, ajoute-t-il.

Selon nos informations, Québec ne s’était pas livré à un tel exercice de prévision depuis au moins 20 ans. Le ministère a mis en place, à l’automne 2022, une nouvelle direction qui a pour but de «soutenir le réseau scolaire en matière de planification de la main-d’œuvre et de recommander aux autorités des solutions porteuses», indique son porte-parole, Bryan St-Louis.

ENCORE PLUS DE DÉPARTS À LA RETRAITE

Ces prévisions sont basées notamment sur le nombre de diplômés en enseignement chaque année et le nombre croissant de départs à la retraite, qui fera un bond de 60% au cours des prochaines années.

Les projections gouvernementales comprennent aussi des «hypothèses de mouvement de personnel», qui prennent en compte les enseignants qui quittent avant l’âge de la retraite et ceux qui abandonnent en tout début de carrière, indique le ministère.

Les projections concernant le nombre d’élèves dans les écoles québécoises ne sont toutefois pas assez élevées compte tenu de l’immigration, selon Martin Maltais, alors qu’il s’agit d’une réalité qui est sous-estimée depuis des années par le ministère dans ses projections démographiques.

«Je ne comprends pas qu’on puisse manquer de jugement à ce point-là», laisse-t-il tomber.

Le professeur de l’UQAR souligne par ailleurs que le recrutement de profs non qualifiés sera de plus en plus difficile, parce que ceux intéressés auront déjà levé la main.

Dans son document, le ministère précise toutefois que les «effets potentiels» de l’Opération main-d’œuvre – qui comprend notamment des mesures pour attirer des étudiants en enseignement – pourraient permettre de réduire les besoins de 30%.

Ces projections, «qui doivent être utilisées avec grande prudence» selon Québec, sont jugées irréalistes par les experts consultés.

OÙ SONT LES ENSEIGNANTS?

Geneviève Sirois, professeure en administration scolaire à la TÉLUQ, estime pour sa part qu’il faut s’interroger davantage sur les raisons qui poussent les profs à s’absenter, puisque ces chiffres démontrent que les écoles ont surtout besoin de suppléants pour les remplacer.

«Ça nous remet en pleine face le problème de garder nos enseignants en classe», alors que Québec mise plutôt sur des formations qualifiantes plus courtes pour contrer la pénurie, déplore-t-elle.

Or la solution passe plutôt par l’amélioration des conditions de travail, selon la professeure de la TÉLUQ.

À la Fédération des centres de services scolaires, on espère que la négociation en cours avec Québec «saura tenir compte, en toile de fond, de la pénurie».

Sa présidente-directrice générale, Caroline Dupré, presse par ailleurs toutes les universités «d’emboîter le pas» afin de former plus rapidement les profs non qualifiés, dont le nombre augmentera forcément dans les prochaines années.

Du côté des directions d’école, Nicolas Prévost souligne toutefois que le recours à des profs sans formation en enseignement représente un «cercle vicieux» qui alourdit encore davantage la charge de travail des collègues qui leur viennent en aide.

NOMBRE D’ENSEIGNANTS MANQUANTS DANS LES ÉCOLES PUBLIQUES QUÉBÉCOISES

2023-2024 2024-2025 2025-2026 2026-2027 Total
Postes ou contrats 2200 1200 1300 1300 6000
Remplacement ou suppléance 2400 1900 1600 1800 7700
Déploiement maternelle 4 ans 125 135 135 135 530
Total 3600 en moyenne par année 14 230

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